[Touslesmembres] Ce que l'on peut faire d'utile pour aider Haïti
Samuel Pierre
samuel.pierre at polymtl.ca
Lun 8 Avr 19:46:51 EDT 2024
*La Presse, Montréal, samedi 6 avril 2024 *
Éditoriaux <https://www.lapresse.ca/actualites/editoriaux/>
*Ce qu’on peut faire d’utile pour Haïti *
*https://www.lapresse.ca/actualites/editoriaux/2024-04-06/ce-qu-on-peut-faire-d-utile-pour-haiti.php?fbclid=IwAR2Q0s-01ksifk7Ux0iP8pSdxL5wx51cOrexBmPa8-IMcC6jZS7qn5K0s20_aem_AUzWpTdLJroU4U4YrobNtqshwsFzGOEgfJhv0L0bjHQSTu1SvplLqf-nDzMWDzNtffA*
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Stéphanie Grammond La Presse
<https://www.lapresse.ca/auteurs/stephanie-grammond>
Si l’on se fie à l’auteur Dany Laferrière, les Haïtiens ne seront jamais
à court d’espoir. « Ils sont tellement habitués à chercher la vie dans
des conditions difficiles qu’ils porteront l’espérance jusqu’en enfer »,
écrivait le membre de l’Académie française dans /Tout bouge autour de
moi/, après le séisme de 2010 qui a fait plus de 200 000 victimes.
De l’espoir, il en faut beaucoup aujourd’hui, alors que le pays
s’écroule politiquement et économiquement.
Cette semaine, un ballet d’hélicoptères s’affairait à évacuer les
ressortissants canadiens, pendant que les 11,5 millions d’Haïtiens
continuent de vivre dans la peur des gangs qui contrôlent environ 80 %
de la capitale Port-au-Prince.
Après avoir libéré plus de 4000 bandits de prison, ces gangs fédérés par
Jimmy Chérizier, alias Barbecue, ont attaqué les commissariats de la
Police nationale d’Haïti, trop faible pour rétablir l’ordre.
La population se réveille la nuit au son des coups de feu et trouve des
cadavres dans la rue au petit matin. L’aéroport est fermé depuis un
mois. Les hôpitaux et les écoles sont en déroute. Même la Bibliothèque
nationale a été pillée cette semaine.
Que peut-on faire pour aider Haïti ?
Le plus utile, pour la communauté internationale, serait d’admettre
qu’elle a joué un rôle dans ce drame, répond Michaëlle Jean, ancienne
gouverneure générale du Canada et ex-secrétaire générale de la Francophonie.
Des centaines de millions en « réparations » que la France a forcé son
ancienne colonie à payer, après l’indépendance de 1804, jusqu’à
l’occupation du pays par les Américains, il y a eu « une obstination à
faire que le pays ne s’en sorte pas », explique-t-elle.
Force est de constater que la recette de l’aide étrangère des dernières
décennies a été un cuisant échec. Mettre un couvercle sur la marmite en
envoyant des troupes étrangères, pour ensuite organiser des élections en
pensant que ce sera suffisant pour rétablir une démocratie durable,
c’était comme mettre un pansement sur un cancer.
En plus d’apporter le choléra en Haïti, les troupes étrangères ont
offert une clientèle en or aux grandes familles haïtiennes qui
fournissent logement, véhicule, essence, nourriture… Or, cette élite qui
contrôle l’économie est aussi liée aux « gangs criminels armés », au
« blanchiment d’argent » et à d’autres « actes de corruption », selon le
gouvernement canadien qui a distribué les sanctions.
Infantiliser Haïti ne mène nulle part. Mais prôner des « solutions
haïtiennes » ne doit pas être une manière hypocrite d’abandonner le pays
à son sort.
Avec le bon dosage, le Canada pourrait jouer un rôle clé, en s’appuyant
sur sa forte diaspora qui crée déjà des ponts naturels pour soutenir son
pays d’origine.
Ottawa peut exercer un leadership international, comme Brian Mulroney
l’avait fait pour lutter contre l’apartheid en Afrique du Sud. Il peut
se distinguer des États-Unis, comme Jean Chrétien l’avait fait en
refusant de participer à l’invasion de l’Irak.
Par où commencer ?
En premier lieu, il faut continuer d’appuyer la réforme de la Police
nationale d’Haïti, la seule force de l’ordre du pays, qui n’a pas
d’armée. Le Canada a annoncé des millions. Mais au-delà des communiqués
de presse, il faudra voir si les agents sur le terrain sont mieux
équipés et formés.
Cela dit, la police haïtienne n’y arrivera pas toute seule, même les
Haïtiens les plus nationalistes le reconnaissent. C’est pourquoi il faut
espérer que la mission internationale autorisée par l’ONU en octobre
apportera au plus vite son appui tactique – ce qui est très différent
des missions antérieures. Plus on tarde, plus les gangs renforcent leur
emprise.
Mais, dans le vide politique actuel, on peut quand même reconnaître les
récentes avancées, si fragiles soient-elles. À la mi-mars, un comité de
transition présidentiel a été mis en place, pour prendre le relais du
premier ministre en exil Ariel Henry et tracer la voie d’une sortie de
crise.
Constitué de sept membres et deux observateurs d’horizons variés, le
comité a certainement plus de légitimité que M. Henry, dont l’arrivée au
pouvoir, à la suite de l’assassinat du président Jovenel Moïse, n’avait
rien de très démocratique.
Reste à voir si les membres du nouveau comité sauront s’élever au-dessus
de leurs intérêts personnels et se montrer à la hauteur des attentes
immenses de la population. Le défi est titanesque : les fondations du
pays sont à reconstruire.
Faut-il revoir la Constitution ? Éliminer le Sénat, haut lieu de
corruption ?
Comment réformer le système de justice affaibli ? Devrait-on mener une
commission de vérité et réconciliation pour faire la paix avec le
passé ? Le fait que Jean-Claude Duvalier ait pu rentrer d’exil pour
finir ses jours en Haïti a envoyé un mauvais signal d’impunité. Si
l’ancien dictateur n’est pas jugé pour ses crimes, qui le sera ?
Justice, santé, éducation… Dans bien des domaines, le Canada a une
expertise qui pourrait être mise à la disposition d’Haïti. Cela se fait
déjà de façon naturelle, grâce à la diaspora.
Un très bel exemple : après le séisme de 2010, le professeur de
Polytechnique Montréal Samuel Pierre a fondé, près de Cap-Haïtien, une
université qui permet aux jeunes d’accéder aux cycles supérieurs, de
décrocher une maîtrise ou un doctorat, grâce à des professeurs de la
diaspora qui enseignent bénévolement, à distance^1 .
Aider Haïti à former et à garder des cerveaux. Agir en région, là où les
bandits ne font pas encore la loi.
Multiplions ce genre d’initiatives et, comme le dit Samuel Pierre,
« gardons espoir que le pays aura le destin qu’il mérite ».
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